(…) Cérémonie de l’inauguration du Monument. – Sur la proposition de M. Batailler
Le Conseil décide que les détails de la cérémonie de l’Inauguration du Monument élevé à la mémoire des Enfants de la Ville de Levroux « Morts pour la France » et le discours prononcé par le Maire, soient insérés au registre des Délibérations du Conseil Municipal.
Détails de la Cérémonie.
Cette cérémonie était présidée par M. Guillerot, Secrétaire Général de la Préfecture de l’Indre.
Le 21 mai à 2 heures du soir le cortège constitué de la façon suivante est parti de la Maison du Peuple pour se rendre au pied du Monument élevé Place de la République.
Composition du Cortège.
1° Cie des Sapeurs Pompiers
1° bis la Société Musicale « l’Indépendante »
2° Les enfants des Ecoles sous la direction de leurs maîtres
3° Le Conseil Municipal, composé de MMr Léon Rouet, Maire, Ferré Alphonse et Girault Jean Bte , adjoints, Tissier, Valin, Blanchard, Pelletier, Devilliers, Mauduit, Guérineau, Batailler, Taillandier, Dioton, Bodin, David, Cadon, Jacquin, Boué, Vernaire, Clément, Rousié.
4° Invités : MMr. Les Chefs de Division de la Préfecture, E. Nivet, sculpteur, Suard, architecte, MM. Bigault-Fauchais, Conseiller Général, Delorme Robert, conseiller d’arrondissement et Pigelet, Maire de Brion.
5° Le Comité du Monument : MMr Pêcherat Joseph, Président, Resmond Aristide, Vice-Président, Léon Rouet, Guérineau Joseph, Taillandier Alexandre, Jacquin Alexandre, Roger François, Gratier Marcel, Billot Alcide, Ferré Alphonse, Duterde Henri, Arnault Silvain, Laurent Arthur, Blanchard Isidore, Valin Charles, Girault Jean Bte, Rousié Louis, Batailler Eugène, Martin Alphonse, Bavouzet Ernest, Vignaudon René, Puard Eugène, Accolas René, Aufrère Jean, Lebrun Edmond, Bourdier Léon, Christin Charles, Compain Georges, Grenon Edouard, Girault Joseph, Guenette Lucien, Meunier Edmond, Lajoie Lucien, Poplin Auguste, Rochard Théodore, Chollet Paul, Bavouzet Albert, Renault Charles, Bodin Auguste, Trémine Henri, Pilorget Lucien, Mmes Trémine Alexandre, Lebrun Edmond, Valin Alexandre, Brunel Charles, Mlles Barrel, Pignux Bethe, Pêcherat Renée, Pêcherat Marguerite, Guérineau Andrée, Aubert Hélène.
6°) Section des Mutilés, réformés et veuves de Guerre du canton de Levroux
7°) Section des Vétérans
8°) Société de Gymnsatique « La Patriote »
9°) Amicale des Jeunes filles
10°) Société Vigneronne «la Fraternelle »
11°) Société Vigneronne « La sain Vincent »
12°) L’Union du Commerce et de l’Industrie
13°) Société des Prévoyants de l’Avenir
14°) Société de la Dotation de la jeunesse de France
15°) Société « La Mutualité scolaire »
16°) Société de Secours Mutuels « La Bienfaisante »
17°) Société de Secours Mutuels « La Philanthropique »
La Musique joue la Marseillaise lorsque tombe le voile qui recouvre le monument ; ensuite le Maire prend la parole et prononce le discours suivant :
[« ] Mesdames, Messieurs,
J’ai aujourd’hui le triste devoir de rendre un hommage suprême à la mémoire des Enfants de Levroux « morts pour la France ». Je ne suis pas un orateur brillant, mais cependant je m’efforcerai de dire avec toute la sincérité dont je suis capable les sentiments que j’éprouve au pied de ce monument.
Ce n’est pas avec une émotion feinte que je vais évoquer des souvenirs pénibles. Le 3 Août 1914, au premier appel, nous étions tous debout, jeunes, vieux [ ;] animés de la même foi, de la même ardeur, unis par une seule et unique pensée, nous apparûmes aux frontières. Dans la lutte gigantesque tout égoïsme s’évanouissait, tous confondus dans les mêmes dangers, les mêmes fatigues, tous soumis aux mêmes privations, aux mêmes souffrances, nous avions la conviction pour la plupart d’être de retour au bout de quelque mois. L’effort pour libérer notre Pays fut lent pénible, nous connûmes les heures tristes, les heures sombres, mais nous étions soutenus par le ferme espoir de triompher. Ce ne fut que 50 mois après que vint la Victoire, et pour qui connut l’héroïsme, l’indomptable courage, l’abnégation des admirables petits soldats qui furent les principaux artisans de la Victoire, l’hommage qui leur est rendu est bien modeste, et nous ne saurions trop les aimer, trop les vénérer. Ils furent ceux qui avec un stoïcisme farouche endurèrent les indescriptibles souffrances et traversèrent les alternatives de la lutte sans uns défaillance. Ils furent ceux aussi qui durent subir souvent les vexations, les brimades de chefs peu bienveillants.
En 1919, un Comité se forma sous les auspices de la Municipalité pour l’érection de ce monument. Ses membres rivalisèrent d’efforts pour recueillir les fonts nécessaires. La dépense était élevée, la souscription publique n’avait pas donné ce que nous espérions, aussi la Ville dut elle s’imposer un gros sacrifice, il lui fut léger car nous avions tous le désir de donner à nos morts un monument digne d’eux. M. Suard architecte en dressa les plans, l’exécution en fut confiée à notre compatriote le sculpteur Nivet. Si le travail fut long, si je dus bien souvent calmer des impatiences, tous comprendront qu’une telle œuvre ne s’improvise pas en quelques mois, soyons reconnaissants à l’éminent artiste qu’est Nivet d’avoir voulu léguer à son pays natal une ouvre admirable, la pus belle qu’il ait conçue dans sa carrière. Certes beaucoup auraient peut- être préféré qu’au lieu de ce soldat qui pense, le monument soit surmonté d’une Victoire ailée ou d’un soldat brandissant son fusil d’un air farouche ayant l’air de crier « On les aura ». Ce qu’a voulu l’artiste, qui malgré sa barbe et ses cheveux blancs a connu lui aussi la guerre de tranchées, c’est refléter toute sa pensée ; ce poilu qui pense aux siens, à son Pays, cette attitude, qui d’entre nous ne l’a pas eue [ ?] Au retour de permission après quelques jours heureux passés en famille, nos pensées allaient vers ceux restés au foyer. Dans la tranchée, en attendant l’heure de l’attaque, à l’heure de la relève, nous étions avec eux [,] nous demandant ce qu’ils deviendraient et si nous aurions un jour la joie de les revoir[.] Telle était la conception de l’artiste et elle reflète l’état d’esprit de beaucoup d’entre nous.
Lorsqu’il s’agit de l’inauguration du Monument, le Conseil Municipal fut unanime à décider que la cérémonie soit simple, sans apparat : c’est par la simplicité qui part du cœur qu’on honore le plus ceux que nous pleurons. Pour conserver à la cérémonie son caractère local il fut décidé qu’aucun Parlementaire ne serait invité. Nous honorons aujourd’hui nos enfants sans distinction de parti. Il s étaient égaux, ils sont tombés pour la même cause, nous devons les respecter. Depuis longtemps on [n’] a que trop abusé des inaugurations pour faire un peu de réclame électorale, ce n’est ni l’heure ni le lieu de faire de la politique, chaque chose à son heure, à son temps. M. Guillerot le sympathique Secrétaire Général de la Préfecture a bien voulu accepter la Présidence de la cérémonie où il représente le Gouvernement, je le remercie au nom des habitants de Levroux [,] ainsi que Mrs les Chefs de Division [,] d’avoir accepté notre modeste mais si cordiale invitation. A cette cérémonie à laquelle furent conviées toutes les sociétés locales, toute la population, nous avons voulu conserver son caractère de recueillement, peu de musique, pas de défilés brillants aux accents de marches guerrières. Il y a dans cette foule assemblée trop de parents, de mères, d’épouses auxquels cette cérémonie rappelle de cruels souvenirs, trop aussi d’anciens combattants qui ont soufferts (sic) et souffrent encore pour n’avoir pas voulu lui donner le caractère d’une fête. Tous comprendront les motifs qui nous ont guidé (sic).
Je place ce monument à la mémoire des 150 enfants de Levroux morts au Champ d’honneur, sous la protection du public. Certes le temps va vite, l’oubli vient, on ne peut vivre avec les morts, mais lorsque vous passerez au pied de ce monument, ayez une pensée, un souvenir pour ceux qu’il honore, rappelez-vous que si nous sommes encore en pays libre ils ont fait le sacrifice de leur vie. Unissons-nous et que notre même pensée aille vers les héros que nous magnifions aujourd’hui, pour leur dire tout notre amour, toute notre reconnaissance. Leur exemple comme un rayonnement traversera la profondeur infinie de l’immense histoire et [,] dans des moments d’ennuis [,] venez au pied de ce monument lire les noms de ceux qui sont tombés pour la défense de leur patrie, pour la France, pour la République. [» ]
Au nom du Gouvernement, M. le Secrétaire Général a pris la parole. Les discours terminés, la Musique joue la marche funèbre de Chopin et le cortège défile en silence devant le Monument où des palmes y (sic) déposées, l’une au nom de la Ville, les autres par chacune des sociétés.
La cérémonie s’est terminée à la Maison du Peuple où un lunch a été offert par la Municipalité à ses invités et aux bureaux des sociétés.
Signé : Pelletier, Girault, Rouet, Devilliers, Ferré, Mauduit, Blanchard, Jacquin, Taillandier, Bodin,Valin, Boué, Batailler